Comment casser quelqu'un, l'enfoncer profondément, entraîner des larmes incessantes, une douleur permanente? Je ne le savais pas mais je l'ai appris à mes dépens. Donnez-lui de l'espoir, donnez-lui la possibilité d'y croire et d'un seul coup, enlevez-lui la dernière parcelle de bonheur, envoyez-lui une autre réalité. Vous verrez, ses forces s'amenuiseront, ses envies disparaîtront et il touchera le fond.
Qui pourrait résister à l'appel du bonheur? Qui refuse toute proposition qui lui semble la meilleure? Il y a des brêches dans lesquelles on s'engouffre parce qu'elles vous semblent une issue du gouffre. Mal m'en a pris. Si on m'a laissé y croire, c'était pour mieux me montrer que j'avais raison, que j'avais le droit d'espérer mais que je ne vivrais jamais ces envieuses émotions. Les faire naître pour mieux les tuer. Parce qu'on ne tue que ce qui existe déjà.
Alors, je suis dans le gouffre, sans personne pour m'aider à m'en sortir, sans aucune issue de secours, sans perspective d'avenir. Affronter le silence, l'absence, l'indifférence. Ne pas oser répondre, enfoncer les clous parce que l'acte serait inutile, le geste fou. Mais avoir si mal que le mal devient pathologie, avoir si mal que l'on perd le goût pour la vie.
Comment en suis-je arrivée là? Comment tombe-t-on dans ces pièges si bas?
Devoir supporter le manque, l'absence et ne plus pouvoir le supporter. Envie de lui hurler mon besoin de l'aimer. Envie de le supplier, de le menacer, de l'obliger. Envie mais impossibilité parce qu'il y a une force à ne pas se laisser dominer par la haine mais à maintenir le respect malgré la douleur et le mépris ressenti.