Dimanche 23 juin 2013 à 21:48
Entre choix et non choix chacun avance comme il peut. C'est finalement comme une partie des cartes, on ne maîtrise pas la donne mais à nous de jouer avec, en écrasant son adversaire, en le respectant, ou sans adversaire, en communauté pour le plaisir du jeu, du vivre ensemble. Parce que vous avez raison, ce n'est pas difficile de vivre ici, parfois même je pense que c'est trop facile, trop facile d'ouvrir le robinet pour boire à sa soif, d'avoir une éducation pour pas un rond, de pouvoir se soigner en toute sérénité... oui, c'est trop facile et c'est sans doute cette facilité qui entraînent tous ces élèves sans but ni envie, qui oublient l'énergie qu'il faut pour leur donner ces connaissances, tous ces hommes, femmes, qui se regardent le nombril et écoutent le moindre petit problème. Oui, c'est tellement facile qu'on refuse de partager le gâteau et qu'on dépense des millions pour empêcher d'autres d'en profiter, pour bloquer nos frontières..
Je ne blâme personne, je reconnais juste la chance que j'ai et en même temps le peu que j'ai fait de la chance qui m'était donnée. Bien sûr, je ne suis pas née avec une cuiller en argent dans la bouche mais j'ai eu la chance de découvrir des valeurs bien plus importantes. Et si aujourd'hui j'ai un statut privilégié, je n'oublie pas ceux qui n'ont pas la même chance que moi. Mais parfois, je me demande si, tous mes maux, ne sont pas ceux d'enfants gâtés qui n'ont pas su voir où était la vérité? Tout allait trop bien, tout était trop facile, j'ai mélangé les cartes et maintenant je ne sais plus jouer.
Choisir ou subir, tout est dans l'entre-deux, dans ce que nous faisons de ce que nous ne maîtrisons pas. Et parfois, on a l'impression qu'on n'a pas choisi mais finalement, c'est un peu nous qui avons décidé que les choses se passent ainsi. Mais il est des événements irrévocables, incontrôlables qui nous rappellent la fragilité de la vie. Absurde, les mots n'ont plus de force, plus rien ne peut agir contre cette faux inéluctable. Est-ce pour cela que Camus m'interpelle toujours? Est-ce pour cela qu'Ionesco me parle avec ses mots sans queue ni tête? Je ne sais. Mais j'aime cette idée que, parce que tout cela est inutile, il faut donc rendre le temps qui nous est donné le plus utile possible, non pas pour nous, mais pour que les autres puissent à leur tour jouir de cette inutilité.
On meurt tous deux fois. Quand notre coeur s'arrête, notre corps cesse de respirer et le jour où personne ne se souvient de nous.